Login

Miscanthus : de la production à l'utilisation, une nouvelle filière s'organise

Au printemps, de nouvelles pousses repartent des rhizomes souterrains, et peuvent atteindre jusqu'à trois à quatre mètres en été.

Culture pérenne, qui ne nécessite ni engrais, ni herbicides, le miscanthus ne manque pas d'atouts. Son usage en horticulture et en paysage se limite essentiellement au paillage des cultures en conteneurs et des massifs. Coup de projecteur sur des expériences menées en Isère, chez des agriculteurs et au sein d'un lycée horticole.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Miscanthus × giganteus (famille des Poacées) est un hybride stérile issu du croisement entre Miscanthus sinensis et Miscanthus sacchariflorus. Sa multiplication et sa propagation ne s'effectuent que par les rhizomes (1). Chaque année au printemps, de nouvelles pousses repartent des rhizomes souterrains, et peuvent atteindre jusqu'à 3 à 4 m en été. La récolte des tiges effectuée par une ensileuse, a lieu en mars avril, avant le redémarrage des nouvelles pousses. Les tiges du miscanthus sont récoltées dès que leur taux d'humidité est inférieur à 15 %. Seules les cannes sont prélevées, les résidus et feuilles tombés au sol ne sont pas exportés. Excepté pour la récolte annuelle, le travail sur cette culture se limite à la première année pour la gestion des adventices, et un ou deux passages l'année suivante. L'entretien et la récolte se font avec du matériel agricole conventionnel. Cette plante vivace ligno-cellulosique est destinée à de nombreux usages. Elle est utilisée comme combustible, dans l'industrie du bâtiment, en litière animale ou en paillage de massifs ou pour culture en conteneurs, sous forme de granulés ou de fines pailles.

1. COMME UNE CULTURE DE POMMES DE TERRE. Miscantus X giganteus pousse facilement, mais il est préférable de l'implanter sur des sols profonds, avec une bonne réserve utile en eau et des pH entre 5,5 et 8. Dans de bonnes conditions, une culture de miscanthus produit un rendement de matière sèche de 15 à 18 t/ha. La plantation s'effectue au printemps sur un sol préparé en profondeur, comme pour une culture de pommes de terre. Il faut éviter de l'implanter directement après une prairie car les rhizomes peuvent être sensibles au taupin, seul prédateur connu.

2. UN RENDEMENT DE L'ORDRE DE 15 À 17 T/HA. Loïs Point, agriculteur à Saint-Barthélémy-de-Beaurepaire (38), a démarré la culture de miscanthus en 2008 par la plantation de 1,35 ha. Les fragments de rhizomes (achetés auprès de producteurs spécialisés) sont plantés à une profondeur de 8 à 10 cm et à une densité de 18 000 à 20 000 plants/ha pour un objectif de reprise de 15 000 à 17 000 plants/ha. La plantation s'effectue avec une planteuse à pommes de terre adaptée. Le coût de revient est de 3 500 euros/ha (fourniture et main-d'oeuvre). Après la plantation, un antigerminatif type herbicide maïs (2) est appliqué pour limiter la concurrence des adventices et favoriser l'étalement des rhizomes. Au printemps suivant, l'ensemble de la culture est broyée, suivi d'une application de glyphosate pour repartir sur un sol propre. Ensuite, plus aucun traitement chimique n'est appliqué durant toute la durée de vie de la culture qui est d'environ une vingtaine d'années. Une première récolte réduite (7 t/ha) a eu lieu la troisième année, puis le rendement a atteint une moyenne de 15 à 17 t/ha les années suivantes (culture irriguée). En dehors du coût de mise en place de la culture, Loïs Point a dû investir dans un hangar avec une ventilation au sol pour garantir la qualité de la récolte. Si les tiges présentent un taux de matière sèche trop faible, il y a un fort risque de montée en température des tas, et de début de dégradation du produit. Environ 95 % de la production sont destinés au paillage horticole : communes, particuliers, pépiniéristes. Pour augmenter sa production (6 ha supplémentaires ont été plantés l'an passé), Loïs Point développe de nouveaux débouchés locaux notamment en tant que litière animale pour les chevaux et l'aviculture. L'absence de traitements et désherbages chimiques, associée à des reliquats en azote à l'automne assez faibles, rend la culture du miscanthus particulièrement intéressante sur les zones de captages prioritaires (3) en remplacement de cultures intensives conventionnelles. Elle constitue un bon compromis pour l'agriculteur qui veut limiter sur ces zones sensibles la pollution des nappes phréatiques. Un désherbage mécanique par herses étrilles peut en outre supprimer tout ou partie des traitements herbicides des premières années.

3. ADAPTÉ AUX CULTURES EN CONTENEURS, AUX GROS LITRAGES. Damien Vivier, producteur de jeunes plants d'arbustes et de vivaces, du godet au pot de 2 l, à Penol (38), utilise les paillages végétaux depuis quatre ans en alternatives aux désherbages chimiques. D'un coût de revient moins élevé que les autres produits (35 euros/m3 en vrac, ou 14 euros le ballot de 175 l), la paille de miscanthus est plutôt adaptée pour les plus gros litrages (2 l minimum) car elle nécessite une épaisseur minimum de 3-4 cm pour être efficace et empêcher la plupart des germinations. Par contre, si l'épaisseur du paillage est trop réduite, l'envahissement par les mauvaises herbes peut être important. Quelques graines d'amarante ou d'armoise peuvent aussi être présentes dans le produit. C'est pour cette raison que Damien Vivier a recours à d'autres types de mulch pour les pots de 1 l ou 1,5 l comme la coque de sarrasin, ou les écorces broyées. Toutefois, même en cas de faible épaisseur, la régulation de l'humidité dans le pot par le paillage de miscanthus est excellente, ce qui confère un meilleur enracinement qu'en absence de mulch, et des arrosages moins importants. De plus, le produit ne « croûte » pas en surface, il est de ce fait mieux adapté que la coque de sarrasin pour les plantes comme le thym, craignant les excès d'humidité au niveau des racines. Le paillage se dégrade en une année, sans générer de faim en matière d'azote.

4. UNE BONNE PROTECTION CONTRE L'ENHERBEMENT. De 2010 à 2013, le lycée Terre d'horizon avec son exploitation horticole, a engagé avec ses partenaires une expérimentation détaillée permettant de comparer plusieurs modalités de paillage en termes d'efficacité, d'incidence sur le sol, de développement des plantes. L'expérimentation a porté sur quatre années de mesures et d'analyses sur différents paillages végétaux en approvisionnement local autour de Romans-sur-Isère (26). Les essais ont été réalisés sur des massifs arbustifs de pleine terre sur un sol propre après plantation.

Parmi les six paillages végétaux testés, le miscanthus présente quelques atouts. Le produit (calibre 2 à 5 mm) a été utilisé sur 4 à 5 cm d'épaisseur (soit 40 à 50 l/m²). Matériau neutre, n'entraînant pas d'acidification des sols, la paille de miscanthus présente un calibre plus fin que la paille de céréale, ce qui permet une meilleure protection contre l'enherbement sur sol préparé. Comme les autres paillages végétaux, il offre néanmoins un milieu favorable (taux d'humidité élevé, structure meuble et pouvoir fertilisant) à la prolifération notamment du chardon des champs (Cirsium arvense, qui se multiplie par drageons) et du chiendent (Cynodon dactylon, qui se multiplie par bourgeons rhizomateux et stolons). La durée de vie du paillage de Miscanthus est de deux ans. En se dégradant, il enrichit le sol en humus (production supérieure à la paille de blé) mais, de faible teneur en éléments minéraux, il ne favorise pas la croissance des végétaux de manière importante comme peuvent le faire le BRF ou encore le cacao. Enfin, le miscanthus ne produit pas de graines et ne provoque pas de levées dans le paillage hormis la présence éventuelle de quelques graines d'adventices.

Claude Thiery

(1) Le rhizome ne s'étend que sur une surface réduite (1 m2). Le miscanthus géant n'est donc pas considéré comme une espèce invasive. (2) Les produits phytosanitaires réglementairement autorisés sont ceux permis pour le maïs (arrêté du 12 juin 2009). Toutefois, ceux-ci ne sont pas tous sélectifs. (3) Captages prioritaires : à la suite du Grenelle de l'Environnement, il s'agit d'une liste de captages pour l'alimentation en eau potable dans lesquels les teneurs en nitrates dépassent régulièrement les 50 mg/l, norme de potabilité pour la distribution d'eau.

La paille de miscanthus présente un calibre plus fin que la paille de céréale, ce qui permet une meilleure protection contre l'enherbement.

Les fragments de rhizomes (achetés auprès de producteurs spécialisés) sont plantés à une profondeur de 8 à 10 cm et à une densité de 18 000 à 20 000 plants par hectare.

La paille de miscanthus est commercialisée en vrac ou en ballots de 175 litres. Utilisée en paillage de massifs, elle a eu, lors d'essais menés au lycée Terre d'horizon, une durée de vie de deux ans et a enrichi le sol en humus en se dégradant.

Loïs Point, agriculteur à Saint-Barthélémy-de-Beaurepaire (38), a démarré la culture de miscanthus en 2008 par la plantation de 1,35 hectare...

... Il a dû investir dans un hangar avec une ventilation au sol pour garantir la qualité de la récolte.

La régulation de l'humidité dans le pot par le paillage de miscanthus est excellente ce qui confère un meilleur enracinement qu'en absence de mulch.

La paille de miscanthus est bien adaptée pour les gros litrages (pots de 2 litres minimum).

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement